Phèdre

Phèdre, mise en scène par Matthieu Cruciani, se tiendra à la Salle Delphine Seyrig à Saint-Denis.

Dans un palais aux murs défraîchis, où la lumière du jour peine à s'infiltrer, tout le monde attend le retour du roi Thésée. Nobles et serviteurs semblent enfermés dans cet espace qui donne pourtant sur la mer, figés dans l'incertitude quant à l'issue d'une guerre en cours. Toutefois, l'immobilisme n'est que de façade. Phèdre, l'épouse de Thésée, brûle d'amour pour son beau-fils Hyppolyte, lui-même amoureux de la jeune Aricie, ennemie prisonnière du palais. L'aveu que Phèdre fait au jeune homme de sa passion enclenche une mécanique implacable de manipulation et de trahison qui conduit à la mort de l'un et l'autre.

Matthieu Cruciani met en scène le chef-d'oeuvre de Racine, dans une version contemporaine habitée par des personnages qu'il rapproche de nous. Il s'appuie sur la version originale du texte de 1677, ponctuée par Racine, écrite pour avancer, enjamber, suivre le sens, au-delà de la mécanique des rimes. La direction d'acteur tend à faire vibrer la musique du vers racinien et à lui insuffler la vitalité inhérente au tourbillon de passions qui emporte les protagonistes.

Ainsi, toute la distribution, Hélène Viviès en tête dans le rôle de Phèdre, porte cette langue à son point d'incandescence, tout en vivacité, nuances et contrastes. Face à la monstruosité des désirs qui circulent entre ces murs quasi carcéraux, les personnages sont capables d'ironie sur leur sort malheureux. Femme osant dire son désir, Phèdre est moins esclave de ses passions que de sa culpabilité. Pleinement humaine et charnelle, elle est ravagée par les contradictions de cet amour et l'acuité de sa clairvoyance.